Thomas B. Reverdy – Seuil – Collection Points – 2005
Hier soir, juste après avoir refermé le livre de Thomas B. Reverdy en me disant que c’était vachement bien et que, décidément, c’était un auteur qui méritait d’être suivi – notamment par moi, et pas seulement parce qu’il est né en 1974… – j’ai voulu écouter la chanson Coney Island Baby de Lou Reed. Pourquoi, me direz-vous ? Eh bien tout d’abord parce que les premières pages du « Ciel pour mémoire » ont Coney Island pour décor, ancienne île aujourd’hui reliée à la terre à l’extrême sud de New York, qui accueille depuis la fin du XIXème siècle des attractions de type Luna Park et draine ainsi des millions de visiteurs en quête de divertissement. Ensuite parce que je me suis dit que l’ambiance de cette chanson collait parfaitement avec le livre de Thomas B. Reverdy. Un mélange de mélancolie, de spleen, le sentiment de quelque chose qui était et qui n’est plus, ou qui prend fin… Difficile de décrire ce que l’on ressent quand on écoute la musique qui nous touche, nous transporte, et encore plus de le partager. En tout cas, moi, cette chanson m’a toujours évoqué cela. Et j’ai trouvé qu’elle convenait bien à ce livre, comme vous allez le comprendre.
Ce beau roman, donc, parle d’amitié. La vraie, celle qui résiste au temps qui passe, aux épreuves, aux aléas en tous genres de la vie. Les deux protagonistes principaux, Thomas le narrateur et Guillaume le disparu – non, pas la peine de me regarder de travers, je n’évente pas l’intrigue puisque la disparition de Guillaume est évoquée sur la quatrième de couverture ! – sont de vrais amis d’enfance. Ils forment ce que l’on appelle une « bande » avec entre autres Julien et Franck, mais aussi Marine et Kim, leurs compagnes respectives. Ils doivent d’ailleurs tous se retrouver dans un restaurant russe de New York pour fêter leurs retrouvailles – seuls Guillaume et Kim vivant dans la « Grosse Pomme », les autres résidant en France. Mais Guillaume ne viendra jamais les rejoindre.
Pourquoi cette dérobade, cette fuite sans explications, qui laisse Kim éplorée et ses amis groggy (et pas seulement du fait de la consommation excessive de vodka tout au long de cette interminable soirée d’attente) ? Jusqu’à la toute fin du livre le lecteur pense qu’il ne le saura finalement pas, et que c’est bien dommage parce qu’il aurait bien aimé comprendre pourquoi Guillaume en a décidé ainsi. Mais c’est là tout le talent de Thomas B. Reverdy que d’ouvrir la première partie du roman sur cette énigme sans la refermer, pour ensuite évoquer les souvenirs d’enfance de Thomas – dans lesquels Guillaume réapparaît puisqu’il fait partie intégrante de cette enfance – et enfin, dans les toutes dernières pages, achever l’histoire sur l’explication qui laisse le lecteur incroyablement ému (en tout cas, c’est l’effet que ça m’a fait à moi…). Car, au fond, il ne pouvait y avoir d’autre fin que celle là.
Comme vous l’aurez compris, j’ai beaucoup aimé ce roman dont j’ai appris en le commençant qu’il était en fait le deuxième volet d’une trilogie. Je compte donc lire celui qui le précède et celui qui le suit, ainsi que le dernier roman paru de cet auteur talentueux – « Il était une ville » – dont le personnage central est la ville de Detroit.
Et pour finir : merci à Doy de m’avoir offert ce livre ! Je crois que je tiens là un auteur qui me parle…
Citations :
« Que les secondes qui s’égrainent finissent par faire des années, c’est le seul mystère ; que nous finissions par vieillir, alors qu’à aucun moment précis nous n’avons changé. »
« (…) il me semble que ma vie, à ce moment là, ressemblait assez aux premières pages d’un roman, lorsque l’écrivain n’a encore qu’une idée assez confuse de ce qui s’est passé avant, (…) et qu’il ne sait pas encore exactement, non plus, où s’arrêtera l’histoire (…) »
Note : 5/5
Shifue.